La Presse de la Manche - Piscine nucléaire Stop s'interroge sur la faisabilité et l'intérêt de ce futur grand chantier

Rédigé le 12/05/2025


INTERROGÉS IL y a quelques semaines par La Presse de la Manche, Nicolas Ferrand, direc­teur du projet, et Nicolas Maes, directeur général du groupe Orano, ont pu préciser quelques points sur le projet «Aval du fu­tur» du géant du nucléaire. Le collectif Piscine nucléaire Stop avoue avoir appris des éléments à travers ces publications dans notre journal.

Mais contrairement à la plupart des élus locaux, le discours tenu par l'une et l'autre des personnalités d'Orano ne plaît pas à l'associa­tion. Lors d'une conférence de presse tenue la semaine passée, ses membres l'ont fait savoir en pointant des éléments «faux», «intrigants» et, surtout, «inquié­tants», selon eux.

« Nous ne donnons pas notre aval pour ce projet!»

D'abord, sur le projet lui-même, qui n'a encore «aucun plan de financement bouclé » «Cela nous Iaisse douter de sa Faisabi-lité», assure le-collectif, qui doute aussi de cette «faisabilité» du projet par rapport à la probléma­tique du territoire lui-même.

Comment seront hébergés les 8000 à 10000 salariés supplé­mentaires annoncés? Comment seront acheminés tous ces sala­riés jusqu'à l'entreprise? Comment accueillir un tel projet sans sortir de l'enceinted'Orano La Hague?

«A-t-on envie de routes en­combrées? Quel sera le nombre d'années de travaux? A-t-on la capacité de loger tout ce monde sans que les prix n'explosent encore davantage? Actuelle­ment, le prix de l'immobilier ne permet déjà pas à toutes les bourses de pouvoir s'acheter une maison. La population veut-elle de ce plus grand projet in­dustriel du monde? Nous, non!», s'agace Camille, l'une des porte-parole du collectif.

Se pose aussi la question du choix du profil de Nicolas Ferrand pour prendre la tête d'un tel projet. «Aménageur urbain, il ne connaît rien ni au nucléaire ni à La Hague. Parisien, il a été em­bauché en septembre 2024 et ne vient dans la région que deux fois par semaine. C'est quand même inquiétant, alors qu'il annonce être à la tête du plus grand projet industriel au monde », s'agace Clara, autre membre du collectif. « Nous sommes en droit de nous interroger sur la capacité de construire le plus grand chantier industriel du monde», poursuit Piscine nucléaire Stop. «Un futur comme celui-là, nous n'en voulons pas», insiste de son côté Dominique, qui ajoute, non sans malice, que «nous ne donnons pas notre aval pour ce projet!»

Les membres évoquent égale­ment le mythe du recyclage et rappellent que le MOX est composé d'uranium appauvri et non de l'uranium de retraitement sorti des usines de La Hague. «Pourquoi construire également ici, à La Hague, l'usine de Mox?

La délocaliser, c'est faire le choix de la concentration des installa­tions nucléaires sur notre terri­toire!»

Tous s'étonnent du fait que des personnalités ou des entités soient favorables au projet? Un vrai débat qui, selon eux, n'a pas encore eu lieu. «Les élus sont-ils prêts à s'engager et, par consé­quent, à nous engager?», s'in­quiètent-ils. «On a même l'im­pression que les élus courent après ce projet. Il y a une forme de monopole industriel», réagit Anne-Lise, membre du collectif. «Ça nous rappelle des scéna­rios déjà joués, quand, dans les années 1960, des technocrates parisiens sont arrivés à La Hague pour imposer cette usine nu­cléaire, avant de repartir. C'est choquant de voir que ces per­sonnes ne vivent même pas sur le territoire», soupire Camille.

  • Sciène LAVENU


L'« Aval du futur », c'est quoi ?

Orano l'évoque en parlant d'« un des plus grands projets in­dustriels au monde», mais concrètement, qu'est-ce que l'«Aval du futur»? C'est d'abord l'assurance que l'usine d'Orano La Hague fonctionne encore pour les décennies à venir. Program­mée jusqu'en 2040, l'usine actuelle va être «dépoussiérée» afin de fonctionner plus longtemps (c'est le programme« Pérennité résilience») jusqu'à la mise en service du programme «Aval du futur». À savoir la construction d'une nouvelle usine de recy­clage de combustibles, la construction d'une usine de fabrica­tion de MOX et la construction de trois bassins d'entreposage de combustibles usés. Pour ce chantier. 8000 à 10000 salariés supplémentaires doivent venir s'installer dans le Cotentin. Alors, pour ou contre ce projet d'ampleur?